ANTOINETTE Sternwheeler africain |
Photo unique et originale - Archives familiales de Guy Delorme |
C’est à partir de cette photo prise par mon père dans les année 60 et retrouvée dans mes archives familiales que sont remontés mes souvenirs de jeunesse.
Ayant vécu ma première
enfance en République Démocratique du Congo (ex
Zaïre, ex Congo
Belge) où mon père travaillait,
nous habitions au bord de la rivière
Kasaï, affluent du Congo. De notre maison, je voyais
naviguer
quotidiennement ce
bateau à vapeur (et bien d’autres)
qui tirait 2 barges (remorquage à couple) chargées
de café, de chanvre, de
palmistes, de manioc, de maïs, de
bois…….
C’est à partir de là, et poussé par mon frère, que m’est venue l’idée d’en faire une reproduction.
N’ayant que cette photo
comme modèle nous avons dû rassembler tous nos souvenirs
aussi
lointains soient-ils pour essayer d’en retrouver les
détails.
Aidé de Jean-Claude Aumond, qui m’en a tiré un plan informatique, je me suis mis au travail .
Longueur
115cm
Largeur
24cm
Moteur électrique réducté (malheureusement pas les moyens d’y mettre une machine à vapeur)
Cette
belle reproduction, très fidèle à
l'original comme on peut le voir, a
nécessité de longs mois de travail.
Guy
nous livre le déroulé en images de son chantier.
Une journée à
bord de l'Antoinette 1, steamer
sur le fleuve Congo en 1900
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Entre quatre ou cinq heures du matin, la
diane
sonnait, et retentissait le premier coup de sifflet. Le chauffeur rallumait les feux de la
chaudière et
le transbordement du bois coupé pendant la nuit, pour huit à neuf heures de marche,
commençait,
envahissant les cales et le pont. Les africains, qui avaient
passé la nuit sur la berge, étaient
sur pied et
s’étiraient, s’interpellaient, se
chamaillaient, s’injuriaient. Tout le matériel
était rembarqué. Le petit déjeuner se
prenait avant ou après le départ.
Ceux qui le voulaient, prenaient un bain entre le bateau et
la berge
pour éviter les crocodiles. Au second coup de sifflet vers 6
h30, la planche était
enlevée. Les retardataires
se dépêchaient de rejoindre le bateau …
à la nage.
Commençait alors une
journée de lente navigation,
morne et ennuyeuse parmi une végétation monotone et entrecoupée seulement
par les appels des
sondeurs : ” fond !” et ”pas de fond
! ". La vie à bord pour le voyageur était
rythmée par les repas. Seul
l’équipage restait actif en permanence. Les passagers européens
vaquaient à leurs
occupations dans la salle à manger-séjour ou
entamaient une partie de cartes, certains
écrivaient quelques
lettres ou annotaient leurs journaux de route … si les trépidations de la machine
le permettaient. Au
pont inférieur, ce n’était que
bavardages, rires, disputes ou chants quelques fois
accompagnés d’un rythme de
tam-tam dans un joyeux brouhaha. Les repas
n’étaient pas inclus dans le prix du
trajet. Les blancs dépendaient entièrement du
capitaine pour leur approvisionnement en
conserves.
C’est le second ou le boy qui s’occupait des vivres frais destinés aux passagers. Le produit de la chasse et les fruits achetés par qui que ce soit, étaient réservés à la table commune. La viande en général était fournie par des petites poules et des chèvres assez maigres, quelquefois un mouton. Mais la chasse permettait de varier l’apport : éléphant, hippopotame, buffle, antilope, singe ou crocodile. La pêche fournissait également une nourriture abondante. Les fruits et légumes étaient nombreux : épinards, racines de manioc, choux. Bananes vertes rôties, maïs, ignames et patates douces étaient servis quotidiennement.. Tous ces produits étaient fournis par les populations des régions traversées, qui venaient faire commerce avec les bateaux. Les repas devaient s’adapter aux ressources du pays d'où l'importance du cuisinier.
Quelques
fois, les factoreries et
les missions recevaient les passagers comme hôtes
à leurs tables. Cela
permettait d’échanger les dernières
nouvelles ou de se dégourdir les
jambes.Le bateau s’arrêtait vers 16 ou 17 h dans
l’après -midi, mais
souvent il stoppait plus tôt. Le capitaine choisissait son
point
d’étape essentiellement en fonction des ressources
en bois. Un africain
plongeait alors, l’ancre serrée dans les bras et
allait l’amarrer au
rivage. Ensuite les africains débarquaient tandis que les
blancs
restaient à bord. C’était
l’heure où les bûcherons qui avaient
passé la
journée à bord, entassés là
comme ils le pouvaient, se mettaient à
l’ouvrage pour une bonne partie de la nuit. Le
mécanicien dégorgeait sa
chaudière, éteignait les feux et
vérifiait le matériel.
Des feux
s’allumaient sur la
berge pour préparer les repas ou éloigner les
animaux. Les nattes
étaient
étendues à terre et d’autres
jetées sur des piquets pour servir d’abri.
Les hommes se réunissaient autour des feux, fumaient ou chantaient. On
se
raillait, on s’interpellait, on racontait la
journée ou on commentait les faits et gestes des
blancs. Les
blancs dînaient à bord vers 19 h. Le repas
était souvent perturbé
par divers insectes qui venaient s’abattre sur la table ou
tourbillonnaient
autour de la lampe à huile de palme, qui
dégageait une odeur âcre et une fumée
épaisse. Ils s’enfermaient
ensuite dans leurs cabines pour la nuit. Vers minuit, les coups des
bûcherons se
faisaient plus rares et c’était l’heure où
le camp s'endormait. Seuls restaient
éveillés les gardes postés
autour du camp et sur le toit du bateau, veillant aux attaques d’animaux sauvages
(éléphants, hippopotames,
lions, etc.) …. ou des populations voisines hostiles,
toujours prêtes à
chaparder.
En 1894, remonter de Léopoldville vers les Falls coûtait 225 Francs (repas non fournis) pour les européens et 50 francs pour les africains et respectivement 110 et 30 francs pour le retour, les religieux bénéficiant d’une réduction de 50 pour cent. |